Catherine MICHEL

Catherine Michel
3 place Dom-Calmet - 88210 SENONES

Catherine Michel est née à Saint-Dié-des-Vosges. Plasticienne et membre du Collectifs d'Artistes Paradoxes, elle est titulaire d'une Maîtrise en Arts Plastiques et d'un DEA en Science de l'art.
L'essentiel de sa production picturale porte sur la représentation figurative, qu'elle cherche à questionner tout en ayant recours à des thèmes éminemment figuratifs (Portrait, Paysage).
Son travail se décline sous la forme sérielle où recherche théorique et expérimentation plastique se nourrissent l'une l'autre.

Paysages, série « Compositions » [1, 2, 3...], acrylique/papier toilé, 11,3 x 15,2 cm.

En tant qu'il est d'abord une notion culturelle (il n'y a pas de paysage en soi dans la nature), le paysage peint est une construction, une « fabrication » d'ordre plastique.
De fait, le tableau de paysage est une invitation à abandonner l' « imitation » stricto sensu de la nature.
En acceptant la suggestion, le paysage autorise la mise en exergue de la matière qui le fait advenir.
Il s'agit pour le peintre de mettre à distance le « morceau de nature » dont le tableau est inspiré pour inventer une nouvelle image non conforme au réel.


Paysages, série « Mur-Paysage » [1-7], enduit, acrylique/toile, 116 x 89 cm.

Le tableau est plat ; le regard se heurte à cette planéité caractéristique : la surface plane du tableau est semblable à un mur (au sens propre).
Le tableau stoppe le regard – il l'intercepte : parce que le regard bute contre une surface plane, quelque chose se dessine et se peint - se rend visible.
Mais le tableau est comme un mur (au sens figuré) : il n'est qu'un leurre, l'illusion de la troisième dimension.
Le spectateur est dans l'impossibilité de crever sa surface.
Mais ce mur est aussi une ouverture (une belle échappée).
Sur son plan (pan pictural) des éléments de la réalité viennent se ficher comme sur un attrape-mouches : le tableau est un dispositif de capture du réel. Par la même, le réel capturé est aplatit ; le tableau a fabriqué une image.
En regard du réel, quelque chose s'est figé (concrétion).
Le vivant pris au piège devient autre - trans-formé, par des procédés picturaux spécifiques.
Le tableau comme mur (« Mur/Paysage-Paysage/Mur ») interroge la Peinture, questionne sa définition et ses enjeux.



Rêve de la pierre

Tristesse du mur...
Mur triste, gazon rit. La brique ébréchée, le moellon à nu.
Pan du mur : surface grise, sale, crayeuse, effritée. Fissures naissantes.
Crépi rugueux piqué de moisissures.
Enduit craquelé. Pierre usée. Plâtre mort.

Vieux mur sommeille ou dort. Mur rêve. Peut-être trouvera-t-il des fleurs.
Mur bat la campagne. Cherche le vaporeux de l'air, une autre écume. Veut son envers, une traversée, un adret qui réchauffe.
Des ailes lui poussent : l'appel du vent, de l'air, et des nuages.
Bâille, puis s'entrebâille...

Mur écoute ; le bleu du ciel, l'eau de la mare.
Respire et gonfle, et se dilate. Cède, pour un ailleurs qui s'ouvre.
Une ligne s'élance, fine fente zigzagante. File sur sa paroi bosselée.
Cassure. Crevasse. Enfle la faille ; fracas de pierres : un pan se détache et tombe.

Un horizon, à mi-hauteur, hissé. Brèche qui se creuse, dénude un ciel pierreux, déjà bleu. Opaque et dur.
Image : apparition. Fragment de paysage inventé, dressé verticalement.
Des terres et des verdures.
Paroi solide. Image compacte, cadrée. Plate, creuse ; en relief et plane.

Entremise. Entrecroisement.
Paysage emmuré se joue de son enclos. Les deux tressés.
Transe d'une forme transformée.
Métamorphose.
Dépaysement du vieux mur ; au creux de l'image...

Pourquoi ne laisse-t-on pas les murs se fissurer ?

Catherine Michel